Thomas Sauvadet a soutenu sa thèse de sociologie à l’université Paris 8 en 2004, et a enseigné au département de sociologie jusqu’en 2006. Il sera, samedi 4 novembre 2006, 18h-19h, invité dans l’émission « Face à Alain Minc », sur Direct8. Thomas Sauvadet publie ces jours-ci deux ouvrages :
- Jeunes dangereux, Jeunes en danger. Comprendre les violences urbaines, aux éditions Dilecta (sortie le 27 octobre 2006)
Pour comprendre comment naissent les « sauvageons » d’aujourd’hui, il faut d’abord étudier leurs ancêtres, puis s’intéresser au désarroi qui affecte le milieu populaire depuis 1980 (précarisations socio-économiques, dépolitisation, divisions internes…). À partir de ce cadre d’analyse, il est possible de saisir et de décrypter un processus de ghettoïsation.
Dès qu’une « cité » s’enflamme, médias et hommes politiques avancent dans l’urgence des remèdes de circonstance. Prenons le temps de réfléchir à cette question fondamentale : comment naissent les « sauvageons » d’aujourd’hui ? Pour le comprendre, il faut évoquer leurs ancêtres (« apaches » et autres « loubards ») et s’intéresser au désarroi économique, culturel et social qui affecte le milieu populaire depuis 1980. « Tolérance zéro », « rénovation urbaine », etc., les politiques élaborées ne résolvent pas plus le processus de ghettoïsation en cours qu’elles ne brisent ce cercle vicieux : concentration de la pauvreté dans les cités, délinquance, stigmatisation globale de la population des cités désertées par les moins pauvres des pauvres. Aucune mesure, « généreuse » comme la discrimination positive ou au contraire « répressive », n’empêchera les émeutes tant qu’on ne s’attaquera pas à ce paradoxe : notre société vante la consommation à tout crin mais en prive d’accès légal ses enfants des cités, contraints à la précarité du jour le jour.
Le magazine L’Express en parle.
Thomas Sauvadet présente ce livre sur France Culture (4 minutes, MP3) - Le Capital guerrier : Solidarité et concurrence entre jeunes de cité, aux éditions Armand Colin (dans la collection « Sociétales » dirigée par François de Singly) (sortie le 9 novembre 2006)
Grande cause morale et sociale du moment, ou épouvantail national… Il est plus facile de plaquer sur les « jeunes de cités » tel ou tel schéma que d’aller à la rencontre de leur altérité pour croiser, soutenir et décrypter leur regard. On les voudrait « agis », par d’autres ou par leur « inculture » propre. Ils agissent en fait selon les contraintes d’un environnement créé par notre société. Avant de dire qui ils sont (« racaille », etc.), il faut comprendre comment ils fonctionnent et se gouvernent. C’est la démarche du présent livre, travail d’un jeune sociologue. Ce dernier a longtemps côtoyé l’univers de la rue et l’analyse sans mépris ni empathie forcée. Sur la base d’une passionnante enquête de terrain, il rend compte du processus qui, à partir de la déstructuration sociale et des abandons républicains des années 1980, a mené à la constitution de groupes marchant au « capital guerrier » : mélange de force physique, de dispositions psychologiques et de réseaux relationnels qui assure une aptitude au combat et passe facilement du système de défense à l’outil de persécution. Cette approche restitue à « la rue », l’espace du pauvre, son caractère hautement concurrentiel. À l’opposé de l’antienne des « violences gratuites », elle s’intéresse à la rentabilité symbolique et matérielle des comportements violents. Rien de plus ambivalent et atypique dans le fade contexte français contemporain que cette cristallisation d’énergie, rien de plus triste que la manière dont on s’entend à la dévaluer plutôt qu’à la canaliser et à l’intégrer positivement dans le social.
Sur le net :
C’est la « vie de rue » qui est plus violente, T. Sauvadet, L’Humanité, 28 octobre 2006
Entretien avec T. Sauvadet;
Résumé d’une conférence de T. Sauvadet;
Pour en savoir plus sur Thomas Sauvadet (articles, thèse, interviews).