Charles Soulié, maître de conférences au département de sociologie de l’université Paris 8, est interviewé dans Libération du 28 mars 2006 :
Deux jeunesses se croisent à Saint-Denis
Même si un tiers des étudiants de Paris VIII viennent du département, la parole est plutôt réservée à ceux qui savent, ou osent, la prendre, souvent des Parisiens.
Depuis lundi 20 mars, la faculté de Saint-Denis est bloquée. Officiellement, pas de cours. A la place, des forums et des débats sur tous les sujets : «La précarité», «Quelle place pour l’Université dans la ville ?». Paris-VIII est une fac plantée au milieu des quartiers du 93. Son recrutement s’effectue là. En 2001-2002, 29 % de ses étudiants résidaient dans ce département. Mais cette université ne «réussit» pas aux enfants de ce département, écrit Charles Soulié, maître de conférences en sociologie (1). Ils s’évaporent au fur et à mesure de l’avancée des cursus.
A Paris-VIII, il y a des jeunes qui traînent, d’autres qui «squattent» comme au pied d’une tour. Mais ils s’invitent rarement aux débats qui, pourtant, les concernent directement. «Paris-VIII a beaucoup d’enfants d’immigrés, poursuit Soulié lors d’un de ces débats. Or, qui parle dans les AG ? Qui tient la table ? Ces enfants d’immigrés ne sont pas vraiment là. Ils sont étrangers d’une certaine manière.» Un autre professeur poursuit : «Les étudiants les plus mobilisées (contre le CPE, ndlr) sont plus français, plus blancs, plus bourgeois», poursuit-il.
source : Libération, 28 mars 2006
Charles Soulié est notamment l’auteur, récemment, d’un article intitulé : «Des usages sociaux du Deug de Paris-VIII : ségrégation sociale, demandes pédagogiques, et habitus disciplinaires», par Brice Le Gall et Charles Soulié, dans Obstacles et succès scolaires (université Charles-de-Gaulle-Lille-III). Cet article s’intéresse au recrutement social et scolaire, aux attentes pédagogiques, ainsi qu’aux objectifs professionnels de 1.594 étudiants de DEUG de Paris 8 présents en cours et provenant d’une dizaine de disciplines différentes (Histoire, Arts plastiques, Communication, Anthropologie, Géographie, Psychologie, Economie, Droit et Histoire). Ces étudiants ont été contactés au travers d’une enquête par questionnaires et entretiens réalisée par des étudiants de Licence de sociologie en 2002/2003, dans le cadre d’un cours d’enquête de terrain. Il met en évidence la diversité du public étudiant de Paris 8, le caractère différencié de ses attentes pédagogiques en fonction du milieu d’origine, comme de ses objectifs professionnels. Son objectif est de contribuer à la réflexion pédagogique et scientifique sur le devenir de l’université, et plus particulièrement de celle de Paris 8 qui, – à l’origine- , fut fondée sur un projet pédagogique, scientifique, mais aussi politique, singulier.